Contraint de renoncer à la Transat St Barth – Port La Forêt pour des raisons de sécurité, ce n’est pas en course, et en solitaire, mais en convoyage avec son préparateur, que Yann Eliès quittera les Antilles pour ramener son bateau à Lorient, son port d’attache. S’il se faisait une joie de se retrouver seul sur son monocoque, après sa troisième place en double sur la Transat Jacques Vabre en IMOCA , le briochin n’a pas envie de terminer son année sur un scénario catastrophe. Confronté à des problèmes électroniques et structurels sur son 60 pieds, le skipper de Quéguiner-Leucémie Espoir a décidé d’être raisonnable. Et même s’il se dit déçu par ce coup d’arrêt, il est comblé par une saison riche en résultats, et a déjà l’esprit tourné vers l’année 2016.
Yann renonce à la Transat St Barth – Port La Forêt
«Ce n’est pas la décision du cœur, mais celle de la raison !» lâche Yann déçu, lorsqu’on l’interroge sur les raisons qui l’ont poussées à renoncer à la Transat entre Saint-Barth aux Antilles, et Port-la-Forêt dans le Finistère. Lancée ce dimanche, cette épreuve sur laquelle s’aligneront de nombreux concurrents du Vendée Globe 2016, faisait clairement partie des objectifs du briochin, mais pas à n’importe quel prix. «Je suis un compétiteur, et j’avais à coeur d’y aller, pour m’entraîner en solitaire et me frotter à mes adversaires. Mais nous avons enchainé les problèmes techniques sur le bateau, et je pense qu’il est plus raisonnable de lever le pied» explique Yann, marqué par le chavirage de Bernard Stamm il y a deux ans. Pris dans des vents d’une rare violence au large de Brest, le skipper suisse avait perdu son monocoque, et failli y laisser la vie. «Cette Transat retour n’est pas une traversée anodine», souligne Yann. «Ca démarre au chaud, mais ça se termine au creux de l’hiver, avec la possibilité de rencontrer de grosses tempêtes. J’ai en tête ce qui est arrivé à Bernard en décembre 2013, et je veux que mon bateau soit dans le hangar pour Noël» confie le briochin, l’esprit déjà tourné vers la saison 2016, et le départ du Vendée Globe, le six novembre prochain.
Ramener le bateau en bon état et au plus vite à Lorient, c’est donc le nouveau challenge que se sont fixés Yann et son équipe. Une équipe qui a fait son maximum pour que son skipper puisse participer à cette transat, avant de devoir se résigner. «Nous savions que le timing serait serré, et nous avons tout donné pour que Yann puisse prendre ce départ. Mais il serait irresponsable de l’envoyer seul dans l’Atlantique Nord, à cette période et dans ces conditions. Les gars n’ont pas arrêté, mais malgré leurs efforts, il nous est impossible de remettre le bateau à l’eau dans les temps !» explique Erwan Steff, le directeur administratif et logistique du projet. Partis d’Itajaï le 18 novembre dernier, les hommes de Quéguiner- Leucémie Espoir espéraient rallier Saint-Barth au plus vite, mais ils ont dû mettre le cap sur Pointe à Pitre, où ils sont arrivés mercredi dernier dans la nuit. «Pendant le convoyage, nous avons découvert que les ogives (qui assurent la jonction hydrodynamique entre la quille et le bateau) bougeaient. Or si par malheur, elles se défont, il faut rejoindre le port le plus proche à une vitesse de cinq noeuds maximum. Au lieu d’aller à Saint-Barth, nous avons donc décidé de rejoindre la Guadeloupe où SMA s’était arrêté après avoir rencontré le même type de problème la semaine dernière. Nous savions qu’en allant au même endroit, nous pourrions profiter du savoir faire et du matériel mis en place, et donc gagner beaucoup de temps» confie Erwan.
A ces ennuis structurels, s’ajoutent des problèmes autour du pilote et des hydrogénérateurs. Une fois la quille vérifiée, pour des raisons de sécurité, c’est donc en double, avec son fidèle préparateur, Vincent Busnel, dit «Enzo», que Yann ramènera son IMOCA à Lorient. Actuellement chez lui à Auray, dans le Morbihan, où il a retrouvé sa famille après sa troisième place sur la Transat Jacques Vabre en IMOCA, Yann s’envolera pour la Guadeloupe dès dimanche, pour un départ prévu mardi au plus tard. Et même s’il se dit déçu de ne pas régater, le skipper de Quéguiner-Leucémie Espoir avoue aussi être à bout de souffle :« Quand je repense à mes premiers entraînements à Port-la-Forêt, le mors entre les dents, et quand je vois mes résultats, je me dis que ça a été une super année ! Mais il est temps qu’elle se termine, car une fatigue de fond s’est installée». Pour autant, le briochin a déjà prévu des séances de préparation physique avec son nouveau coach, François Bonnot, qui lui a concocté un programme où VTT, surf et Montagne auront leur place pour varier les plaisirs.«Je me suis aussi également acheté un moth à foil » lance Yann, déjà impatient de voler avec les copains propriétaires de ce nouveau joujou qui commencent à être nombreux. Mais la priorité sera le chantier d’hiver, et la qualification pour le Vendée Globe 2016. Il lui faudra effectuer 1500 milles en solo. Or, The Transat, et la New-York - Vendée seront de belles occasions de le faire.