La première étape de la 48e édition de la Solitaire Urgo – Le Figaro s’annonçait copieuse. Au final, elle a carrément été dantesque, avec des vents jusqu’à 50 nœuds et une mer démontée, mais surtout, elle a créé des écarts importants, voire rédhibitoires pour certains. En ce qui le concerne, Yann Eliès a plutôt bien tiré son épingle du jeu. Auteur d’un très bon début de course, il a cédé le leadership au moment du plus fort du coup de vent, avouant un petit moment de faiblesse. A l’arrivée, c’est toutefois une belle cinquième place, avec un retard de 39 minutes sur le leader, Nicolas Lunven. « Un delta raisonnable », selon ses propres mots. Interview à chaud.
Yann Eliès : « Il va falloir se battre »
Yann, quel bilan tirez-vous de cette première étape ?
« Globalement, j’ai trouvé ça dur. J’ai mis du temps à me mettre dedans et j’ai un peu lâché prise dans le vent fort. De ce fait, j’ai pris quelques milles dans la vue. Une fois que c’était fait, il n’y avait plus grand-chose à faire car c’était du tout droit. J’ai essayé de faire des petits trucs, mais il n’y avait rien d’évident à gratter. Au final, ce que je retiens, c’est cette première partie de course où j’ai vraiment été devant, où je me suis fait plaisir et où j’ai fait des belles trajectoires. Là, j’ai vraiment navigué comme j’aime le faire. A l’arrivée, ça fait un peu moins de quarante minutes de retard sur le premier. C’est un delta raisonnable. »
A quel moment précis avez-vous lâché prise ?
« Après Rochebonne, j’ai vu que ça allait monter à plus de 45 nœuds et qu’il y aurait une mer de folie. Je me suis dit qu’il fallait réduire mais que d’aller faire le couillon à l’avant, c’est hors de question. Pendant huit heures, j’ai reçu en long, en large et en travers. A ce moment-là, j’avais beau être bien équipé, j’admets que j’ai eu un petit moment de faiblesse, ce qui est tout à fait humain, je crois, dans ce type de conditions. Bien sûr, il n’aurait pas fallu lâcher mais c’est comme ça. J’essayerai de me rattraper ailleurs. C’était quand même très violent. Impressionnant. C’est monté fort, très vite. On était prévenus mais on a, malgré tout, tous été un peu surpris par l’état de la mer. Le Figaro est un bateau petit. Tu te retrouves vite dans le cockpit, à quatre pattes, attaché avec ton harnais à te demander ce que tu fous là. J’ai pensé aux jeunes ou à ceux qui n’ont pas trop d’expérience. Ça a dû être insurmontable pour eux. »
Avant le départ, à Bordeaux, vous disiez attendre l’arrivée de cette première étape pour savoir ce que vous seriez réellement capable de faire sur cette 48e édition. Qu’en est-il ?
« Je me suis super bien rassuré. Au final, ça ne se joue à pas grand-chose. J’ai eu la chance de bien partir et de sortir de l’estuaire de la Gironde en tête. Si cela n’avait pas été le cas, est-ce que j’aurais eu cette capacité à revenir, comme Charlie Dalin ou Sébastien Simon ? Je ne sais pas. En tous les cas, lorsque je suis devant, je suis capable de faire des belles choses et ça, c’est bien. Je suis content de mon étape, même s’il y a des petites minutes qui se rajoutent par rapports aux premiers. Idéalement, il aurait fallu faire troisième. Là, j’ai peut-être un petit 5-10 minutes de trop dans la vue. C’est clairement une étape qui a sélectionné. Malheureusement, il y a eu de la casse. Je pense à Erwan Tabarly ou à Anthony Marchand qui ont dû abandonner. A Jérémie Beyou, aussi, qui a manifestement eu des soucis techniques puisque je ne l’ai pas vu devant. »
Dans quel état d’esprit allez-vous aborder la suite ?
« Aller décrocher une victoire d’étape, ce serait génial. La gagne ? Pourquoi pas. Je vais prendre manche après manche. Vu l’état de forme, je vais voir déjà comment je récupère. Pour l’instant, ce n’est que la première étape. Il en reste deux grosses à se faire, plus une petite à Concarneau qui ne va pas être évidente. Je ne crie pas encore victoire sur ma capacité à faire de belles étapes. A chaque fois, il va falloir que je me batte. »